Trésors de l’Institut ethnographique et Musée de Sofia

Date : 7 août 2009

Le musée d’ethnographie de Sofia, en Bulgarie, possède de nombreux objets, datant du 18ème siècle jusqu’au 20ème siècle, répartis en différents fonds.

Le fond « Tissus populaires bulgares » rassemble environ 5000 objets, pendant que le fond « Costumes traditionnels bulgares » en rassemble plus de 19 000. Les fonds « Poterie », « Objets en cuivre » et « sculptures sur bois » rassemblent à eux trois 10 000 objets. Enfin, le fond « Objets de l’intérieur de la maison » présente environ 3000 objets.

A partir de ces objets, des expositions sont organisées autour du cycle de la vie, de l’intérieur des maisons traditionnelles, des métiers familiaux ou encore du mariage. Ces objets nous intéressent et ont rejoint les collections virtuelles du site ethnoclic parce qu’ils illustrent les pratiques de naissance et de la petite enfance dans le monde, les façons de se vêtir et de se parer ou tout simplement les manières de vivre hier et aujourd’hui.

Etre un enfant en Bulgarie

Berceau tissé

Ce berceau est en étoffe tissée de laine et s’adapte à la forme du corps de l’enfant. Il est rouge, rose, jaune et bleu foncé, couleurs caractéristiques de la région des Rhodopes moyen, montagnes au sud de la Bulgarie dont il provient. La laine, très répandue dans ces régions, protège les enfants du froid et de la chaleur: en effet, entre le tissu et le corps, la laine garde une couche d’air tempéré.

L’utilisation de ces berceaux est très ancienne et permet tant à la mère de le fixer sur son dos pour porter son enfant, que d’accrocher le berceau à une poutre, au plafond de la chambre ou bien à un arbre dans le champs où elle travaille.

 

Chapeau d’enfant avec amulettes

Utilisé en Bulgarie, ce chapeau en velours est couvert d’amulettes: fil rouge, pincettes, gousses d’ail, herbes, petites monnaies, verroteries, coquillages, croix et petite icône. Elles permettent de protéger l’enfant du mauvais oeil et des créatures perfides. De plus, il les protège aussi contre le froid. Son riche ornement montre le mélange des croyances, des conceptions païennes et religieuses. Ici se mélangent des symboles orthodoxes, catholiques et musulmans.

Ces chapeaux de nouveaux-nés, ornés d’amulettes, sont utilisés dans toute la Bulgarie, mais celui présenté ci-dessus vient plus particulièrement du village de Biala où il a été acheté par le musée au cours du 20ème siècle.

Se vêtir et se parer en Bulgarie

Boucles d’or

Cette boucle de ceinture pour femme est ornée de figures de dragon et d’un motif végétal au centre, avec un oiseau. La figure repoussante du dragon est censée agir comme une amulette et protéger les jeunes filles du mauvais oeil, en effrayant les personnes qui la regardent. Selon le costume porté, les boucles peuvent avoir une forme différente, arrondie ou ellipsoïdale et être d’un métal différent (bronze, argent, coucher d’or ou incrustation de nacre).

Appelées « boucles d’or » dans les chants populaires, elles font partie de la ceinture, élément indispensable du costume féminin. Elles permettaient aussi d’informer sur le statut social de la femme et la région où elle habitait. Les boucles de ceinture constituent un objet personnel transmis de génération en génération.

Les boucles de ceinture sont populaires dans toute la Bulgarie, mais aussi dans d’autres pays balkaniques. Celles-ci viennent de la région de Sofia et était utilisée au 19ème et 20ème siècle.

Chemise brodée, symboles des formes et des couleurs

Les chemises de femmes bulgares étaient le plus souvent en tissus de chanvre, de lin ou mélangées avec du coton. Elles étaient souvent richement brodées et colorées sur les parties proches des parties découvertes du corps (les pieds, les bras, le cou, la poitrine). En effet, ces broderies étaient considérées comme protégeant du mauvais-oeil, notamment grâce à leur couleur rouge. De plus, la broderie attire le regard par ses vives couleurs, par l’esthétique et la beauté de ses ornements.

Si le rouge est la couleur de base de la broderie et symbolise le soleil et sa lumière vivifiante, le jaune, couleur de l’or éternel, est aussi utilisé ainsi que le noir, couleur de la terre et du monde souterrain. Enfin, on y trouve également du bleu, couleur protectrice. Ces couleurs peuvent former des motifs de losanges, symbole du féminin et du champ labouré et semé, entourés de rosettes, symbole du masculin et du soleil. Ces motifs se retrouvent sur la photo présentée ci-dessus. Leur rencontre exprime le mariage entre le ciel et la terre qui crée la fertilité. Ainsi, ces chemises sont portées toute l’année par les femmes en âge de procréer (de 15 à 50 ans).

La chemise brodée est un objet personnel. Elle est sujette à la magie, ceci pouvant nuire à la santé et au bonheur de la femme à qui elle appartient, c’est pour cela qu’elle est bien gardée dans un coffre.

La broderie est utilisée pour décorer les vêtements dans tout le territoire ethnique bulgare, mais les motifs et les couleurs varient et composent un code qui donne une information sur le statut de la femme (son âge, sa position sociale) et sur sa région d’origine. Celle présentée sur la photo est typique de la région de Sofia.

Demi-bas tricotés

Ces demi-bas sont tricotés en fil de coton et de laine rouge foncé qui assurent chaleur et aération. Ils sont décorés d’ornements multicolores et de motifs végétaux. Très souvent, la décoration des demi-bas est semblable aux broderies des chemises. Ainsi, sur ces demi-bas, la partie supérieure est réalisée avec de larges bandes représentant des losanges imbriqués et des rosettes entourée de figures géométriques de couleurs roses et bleues, bordées des deux cotés par des rectangles blancs et verts. La rosette, ainsi que la couleur rouge, sont des symboles du soleil et de sa lumière vivifiante. La couleur bleue repousse le mauvais oeil, elle a une fonction protectrice. Le fil d’or, pour les demi-bas de fête, symbolise l’éternel. La couleur verte rappelle la nature renaissante de laquelle dépend la vie des hommes.
Ces demi-bas couvrent les pieds et les jambes des femmes jusque sous les genoux et leur tiennent chaud. Les femmes enfilent leurs chaussures par dessus. Chaque femme tricote son modèle, ce qui rend chaque paire de demi-bas unique. Ceux richement décorés qui sont présentés ici, ne se portent que les jours de fête, notamment à l’occasion du mariage.

Répandus dans toute la Bulgarie, les demi-bas différent selon les régions en raison de leurs décorations spécifiques (ornements, couleurs). Les demi-bas présentés ici viennent de la région sud-ouest du pays et ont été acheté en 1951.

Dolaktenik, vêtement d’homme

Cette veste pour homme est faite d’un tissu épais de laine colorée en bleu foncé. La poitrine, les épaules et les manches sont ornées de couture saillante en fil de coton blanc. Autour du cou et aux bords des manches, il y a des galons torsadés de fils blancs et rouges. Le devant et les manches sont bordés de cordons noirs. La simplicité des couleurs, le blanc sur le fond bleu foncé, et l’ornement linéaire rendent le vêtement particulièrement beau. Ce vêtement est cousu en trois pièces, un dos et deux pièces de devant. Il est ouvert sur le devant pour bien laisser voir la chemise portée dessous.

Nommée ‘dolaktenik’ parce que ses manches s’arrêtent aux coudes, elle fait partie du costume traditionnel masculin de fête. Cette veste est uniquement portée par les jeunes hommes encore célibataires et, en plus de tenir chaud, elle souligne l’âge et le statut social de son propriétaire.

Ce type de veste provient de la région de Sofia.

Tablier de femme

Ce tablier en laine, de forme rectangulaire, est noir avec des figures blanches anthropomorphiques. Ce sont vraisemblablement des femmes saintes se tenant par la main. Elles ont un caractère protecteur. Le décor de ces tabliers illustre souvent une conception du monde, une fonction spirituelle et magique ainsi que la situation sociale de la femme. Ils peuvent être de différentes longueurs.

En Bulgarie, le tablier est l’élément principal de l’habillement féminin traditionnel: il est un des symboles de la femme. Il se porte sur la partie inférieure du corps et s’attache derrière la taille au dessus de la robe. Dans certaines régions de Bulgarie, en plus du tablier de devant, on met un tablier postérieur. Au cours de certains rituels, on peut aussi porter plusieurs tabliers superposés. Cela permet de protéger les habits ou bien de transporter des petits objets dans le cadre du travail quotidien.

Le tablier faisait partie de l’habit quotidien et des fêtes entre le 19ème et le milieu du 20ème siècle, et ce, sur tout le territoire ethnique de Bulgarie.

Koukers, hommes masques

 

Ces masques de Kouker sont des masques de forme conique en cuir de chèvre à longs poils, qui cachent toute la tête jusqu’au cou. Ils sont noircis en plusieurs endroits et ornés d’haricots secs, maïs et piments. Les contours des ouvertures pour les yeux et la bouche sont en tissu de laine rouge. Chaque homme fabrique soi-même son masque, de manière à ce qu’il ait un aspect effrayant et que ses touches de couleurs rouges symbolisent la fertilité et la fécondité. Ainsi,
chaque masque est unique, réalisé selon la fantaisie et l’inventivité de son porteur.

Ces masques sont portés lors des jeux carnavalesques pratiqués le jour de Sirni zagovezni, 40 jours avant Pâques. Ils sont portés avec un costume de femme de la région: chemise, robe, souliers, mocassins, etc. ainsi qu’avec plusieurs cloches de bétail. A la main, ils ont des épées en bois rouge. Ils portent des morceaux de cuir à poil des genoux jusqu’aux pieds.

Les Koukers sont sensés nettoyer le chemin du printemps: avec les cloches, ils chassent le mal, l’hiver et les maladies. S’ils rencontrent quelque habitant, celui-ci s’agenouille et le kouker passe sa jambe droite au dessus de lui comme un arc. Ensuite, commence au centre du village une fête commune avec le reste de la population. Tout le monde danse la ronde traditionnelle bulgare, les gens se tiennent par les mains et exécutent des pas de danse au rythme de la musique.

Ces jeux carnavalesques traditionnels et ses masques koukers viennent d’époques lointaines: ils trouveraient leur origine dans les fêtes de Dionysos en Grèce Antique. Aujourd’hui, les jeux renaissent et le nombre de participants augmente.

Les jeux masqués sont pratiqués par la plupart de la population bulgare. Le masque proposé ici vient du village Chiroka laka, dans la région des Rhodopes moyens.

Mocassins, tzarvuli

Ces mocassins sont des souliers en cuir de porc ou de veau de forme très simple: ils suivent la forme des pieds, les enveloppent et se fixent à l’aide de lacets en cuir. Ils n’ont pas de décoration.

Ces mocassins peuvent être portés en été, pied nus ou bien en hiver avec des chaussettes tricotées en laine à motifs multicolores les jours de fête. On ajoute parfois des morceaux d’étoffe tissée en laine blanche qui enveloppent les pieds, ils sont fixés par des lacets croisés. Ces mocassins protègent les pieds de l’humidité et du froid. Ils sont le seul point commun entre la tenue traditionnelle de la femme et de l’homme.

Le port de ces mocassins traditionnels a perduré dans la population paysanne jusqu’à la moitié du 20ème siècle en Bulgarie, surtout dans les villages.

La maison bulgare et son mobilier

Cafetière Djezve

 

Ce récipient a la forme d’un cône tronqué avec deux poignées, la petite pour l’accrocher et la longue pour le tenir quand il est chaud. Cette longue poignée est richement décorée de trois oiseaux ajourés. Au milieu (coté extérieur) est forgée une décoration géométrique faite de lignes parallèles et inclinées. Sur la partie basse et haute du récipient il y a des festons (demi cercles liés entre eux par des points). En bas, ces motifs cachent la liaison entre le fond et les parois de cet objet. Le goulot est composé d’un bec finement travaillé, décoré de lignes zigzaguées. Il est en cuivre, matériaux qui permet de garder la chaleur.

Cette cafetière est conçue spécialement pour faire bouillir le café turc, pratique adoptée dans les villes des Balkans depuis la période renaissance bulgare et devenue peu à peu populaire dans les villages. Aujourd’hui, bouillir du café dans un tel récipient fait partie des offres proposées par les agences touristiques ! Traditionnellement, chacun prépare son café dans sa cafetière personnelle en la faisant chauffer sur du sable chaud: une cuillère de café est mélangée à un verre d’eau, à deux cuillères de sucre et à des épices.

Cette cafetière, donnée au musée en 1934, vient de la ville de Plovdiv, au sud du pays.

Cruche

Cette petite cruche en argile a un corps gonflé, un goulot mince et un bec élargi. Le bec est lié élégamment au goulot. Le récipient est coloré en vert et est décoré de trois morceaux saillants en forme de croissants. Sur le corps gonflé, des palmettes sont dessinées, en formes de fleurs et de cercles d’argile. Les décorations de cercles et de rosettes renvoient au culte du soleil qui assure la vie éternellement renouvelée.

Les cruches sont des objets de famille, utilisés au quotidien ou bien, comme dans le cas présent, uniquement dans les grandes occasions ou rituels pour conserver des liquides. Les récipients de ce type sont employés dans toute la Bulgarie, avec des particularités régionales: par exemple, les récipients en argile verts et jaunes sont typiques de l’ouest de la Bulgarie.

Les cruches peuvent être fabriquées de différentes manières: à la main par les femmes ou au tour de poterie par les hommes. Ce savoir, considéré comme sacré, était transmis uniquement au sein de la famille: on croyait qu’il ne suffisait pas d’apprendre le métier mais qu’il fallait aussi du talent, cadeau de Dieu. Le potier laissait soi-disant son âme dans ses réalisations, en particulier dans les plus spéciales, pour des fêtes ou des coutumes. Ainsi, le travail de la poterie était considéré comme étant lié à la magie. En effet, d’après la tradition, le potier purifie l’argile des forces malfaitrices pour le transformer en matériel favorable au service des hommes. Sa couleur verte symbolise le lien avec la nature, mais aussi des forces magiques différentes: la magie n’est pratiquée que dans des récipients verts.

Le récipient présenté ci-dessus a été acheté dans le nord-ouest de la Bulgarie en 1949.

Cuillère

Cette cuillère en bois présente une poignée sculptée de deux serpents et d’une tête de berger stylisée. Elle est peinte en rouge et en vert. Si le serpent symbolise l’esprit des ancêtres, il est en même temps protecteur de la famille, de la maison et de la fécondité du troupeau. Le rouge symbolise le soleil qui assure la fertilité et le vert symbolise le lien entre l’homme et la nature renaissante.

Ces cuillères sont généralement en érable, en avelinier, en orme, en frêne, en charme, en saule ou en buis, bois résistant à l’eau, à l’humidité et aux hautes températures. Cela permet de les utiliser pour manger et cuisiner. Elles peuvent également avoir une fonction rituelle et être utilisées pour des rites magiques contre le mauvais oeil et les cauchemars ou apporter le succès familial: ainsi, une jeune mariée emporte toujours dans son bagage deux cuillères de sa maison pour la maison de son mari.

La cuillère en bois est un objet personnel : chacun à sa propre cuillère reconnaissable à la poignée sculptée. Celle-ci appartenait à un berger de la région de Samakov en Bulgarie.

Petite chaise en bois

Cette petite chaise en bois sec a été faite à la main avec une partie du tronc et des branches d’un arbre. Elle a trois pieds et son dossier est courbe afin d’épouser la forme du dos. Il est décoré d’éléments géométriques, d’une rosette à six feuilles symbolisant le soleil (signe d’abondance et de bonheur) ainsi que du symbole de ‘l’arbre de vie’, de ses fleurs, de ses fruits et de ses oiseaux. On y voit aussi une petite chapelle stylisée.
Ce genre de chaise, présente dans toutes les maisons traditionnelles du territoire bulgare au 19ème et 20ème siècle, peut avoir trois ou quatre pieds, un dossier, être arrondie, ellipsoïdale ou réniforme.
Elles étaient utilisées pour s’asseoir autour de la table ou près du foyer et étaient en priorité destinées aux grands-parents ou aux invités. Elles étaient également utilisées à l’occasion de la coutume « attraper un saint ». A cette occasion, une personne ayant échappé à un accident exprime sa gratitude en choisissant un Saint pour être son ange protecteur. Pour ce faire, la chaise est renversée, une bougie est collée à chaque pied et un homme âgé du voisinnage les nomme du nom de saints importants. Après il appelle la personne et l’invite à choisir une bougie. Quand le saint est choisi l’homme âgé adresse un souhait au saint pour garder et protéger la personne du mal et l’aider dans chaque activité de sa vie. L’événement est ensuite fêté avec des hommes âgés du voisinage.

Cette chaise a été achetée en 1955 par l’ethnographe Marinov Vassil et donnée au musée.

Plat, tepsia

Ce plat est en cuivre et sur sa face interne, une couche d’étain a été rajoutée, lui donnant une couleur gris argenté. Il a une forme ronde et est décoré de points agencés de manière à créer des motifs de végétaux et de poisson. Ce plat est en effet destiné à cuire une carpe le jour de la St. Nicolas, saint chrétien et souverain de la mer et de l’océan, symbolisé par le motif du poisson. En effet, Saint Nicolas étant considéré comme le patron des marins, ils organisent une fête en son honneur chaque 6 décembre. Ce jour là les bateaux doivent s’arrêter, on fait une offrande de poisson (une carpe), on prépare la table et on chante des chants rituels.

Le nom de ce plateau, tepsia, vient du turc et désigne un plat qui sert à cuire différents mets. Sa matière, le cuivre, permet de garder la chaleur des plats et des liquides. Ils sont souvent achetés à l’occasion d’un mariage ou d’une nouvelle maison. Leurs décorations dépendent de la richesse de la famille.

Le Musée ethnographique de Sofia a acheté ce plat à son propriétaire en 1930, au sud du pays, dans la ville de Plovdiv.

Support à tisons

Ce support à tisons en fer forgé a la forme stylisée d’un cheval: corps allongé, quatre pieds, une queue et une tête avec crinière. Sous sa tête, deux têtes de serpents stylisées sont représentées.
Tous les objets en fer liés au foyer sont utilisés pour des pratiques magiques liées à la croyance de la force magique du feu. Représentant le soleil, le feu est pensé comme protégeant des forces malfaitrices et des maladies. Ainsi, des figures fantastiques ou mythologiques sont représentées sur ces objets liés au feu: le serpent est vu comme le gardien du foyer et comme vivant sous lui et le cheval est l’intermédiaire cosmique entre le monde des vivants et des morts. Des oiseaux et des dragons peuvent également être représentés. Ils permettent d’assurer la prospérité et de protéger la maison et ses habitants des démons en faisant office d’incantation et de protection magique.
Ces supports à tisson étaient utilisés dans le foyer des cheminée des maisons situées en altitude jusqu’à la fin du 19ème siècle. Ils permettaient de ranger les tisons.

Tapis de Tchiprovtsi

Ce tapis en laine mesure 116 cm sur 380 cm. En son centre, l’arbre de vie est représenté, entouré par des oiseaux. La couronne de l’arbre symbolise le ciel (le monde ou habitent Dieu, les saints, les anges et les oiseaux) et le tronc symbolise le monde souterrain où habitent les ancêtres et les créatures démoniaques. Il est tissé de fils colorés en rouge, brun, vert, jaune, bleu et bleu foncé. Si tous les tapis de Tchiprovtzi présentent des éléments décoratifs identiques (motifs géométriques, animaliers (grenouilles/canards/poules), anthropomorphiques (la mariée noire)), leurs couleurs sont différentes. En effet, elles peuvent être chimiques ou naturelles. Dans ce dernier cas, chaque femme a sa propre recette pour créer des teintures à partir de plantes naturelles. Ainsi, chaque tapis est unique par ses couleurs.

Ces tapis recouvrent le plancher des chambres et des pièces de visite des maisons pour garder la chaleur et rendre l’espace plus gai. Parfois, ils servent aussi de couverture sur le lit. Ils faisaient parti du trousseau des jeunes mariées: juste avant les noces, tous les tissus du trousseau étaient exposés, montrés à tout le village, montrant l’habileté des femmes l’ayant réalisé.

D’abord production domestique pour les besoins du foyer, ces tapis deviennent des marchandises à partir du 19ème siècle. La ville de Tchiprovtzi devient alors un des centres les plus éminents de la production de tapis à l’époque de la renaissance bulgare (19ème siècle) jusqu’à nos jours. De ce fait, les tapis de Tchiprovtzi se retrouvent à peu près dans chaque maison bulgare, même aujourd’hui.

Tasse de berger

Cette tasse a une forme ronde avec une longue poignée et un couvercle permettant de protéger le liquide contre la poussière. Elle est finement décorée de motifs sculptés: son couvercle est décoré d’un oiseau, de deux branches et de trois petites chapelles stylisées surmontée de trois croix. On peut penser que les ornements sortants des deux cotés des chapelles symbolisent des bras qui prient. Toute cette composition peut être vue comme ‘l’arbre de vie’. Au fond de la tasse, il y a deux rosettes l’une sur l’autre symbolisant le soleil. A l’extérieur, la tasse est décorée de zigzag, symbole du serpent faisant le lien entre le monde terrestre et céleste, exprimant la fertilité au sens large. Enfin, sur la poignée il y a une spirale et une croix. Tous ces signes sont sur la tasse pour attirer la bienveillance des forces terrestres et célestes. Elle est réalisée avec du bois de platane, arbre sacré dont la force magique protège contre les forces malfaitrices.

Cette tasse est réalisée et utilisée par les bergers bulgares des montagnes. Elle est adaptée à leur mode de vie sur les pâturages avec les troupeaux: elle peut être accrochée à la ceinture, ne se casse pas, et permet de boire du lait ou de l’eau

Cette tasse est achetée en 1955 par l’ethnographe Marinov Vassil.

 

Estampe

Cette estampe rectangulaire est composée d’un sujet religieux représentant l’Archange Saint Michel. On y voit Saint Michel en uniforme court aux motifs végétaux, en espadrilles de cuir et en pélerine. Ses deux ailes sont déployées. Sur ses épaules sont représentés deux masques qui sont des éléments de cuirasses militaires romaines. L’archange est en mouvement, le pied sur le corps d’un homme mourant. De la main droite, il tient une épée dirigée vers le corps pour lui sortir l’âme. A côté, on voit deux figures, des parents attristés ou bien des esclaves. Derrière le saint se trouve un panorama architectural encadré de deux colonnes. Les édifices sont dessinés sans perspective, avec des toits et des fenêtres. L’Archange Michel est très souvent choisi comme protecteur de la famille et l’on prie devant cette icône les jours de fête pour la prospérité de la famille ou bien en cas de mort. L’Archange Michel est en effet sensé sortir l’âme de chaque mourant à l’aide d’une épée ou d’un couteau avant de l’emmener au près de saint Pierre qui lui ouvre le paradis ou l’enfer.

Cette estampe de papier est obtenue à l’aide d’une presse d’imprimerie: la feuille de papier est placée sur une gravure en cuivre ou en bois. La gravure de laquelle est faite l’estampe proposée ici est travaillée par un moine graveur très habile. Pour graver, il faut une plaque en cuivre, des burins spéciaux et des aiguilles.

Ce type d’estampe était utilisé du 17ème au début du 20ème siècle en Bulgarie et étaient accrochées au mur de la maison en tant qu’ icône familiale. Elles sont ramenées par les pélerins ou les marchands comme cadeau à leur famille. Elles sont en effet très populaires et leur prix est abordable pour tous.

Iconostase

Cet iconostase rectangulaire en bois de tilleul séché présente des sculptures symétriques des deux côtés. De chaque côté, il y a une colonne, placé sur une corniche sculptée. Au centre, il y a une croix, des deux cotés de laquelle sont représentés deux oiseaux tenants deux feuilles de chêne. Au dessus de la croix, il y a une couronne en feuilles de chêne. La partie supérieure de la corniche est occupée par deux oiseaux volants. Les ornements sont influencés par le style baroque et présente une abondance d’ornements végétaux et d’oiseaux en mouvement.
L’iconostase sert de cadre à l’icône : ensemble, elles forment l’autel familial. C’est un objet possédé et respecté par tous les habitants. Il se transmet au sein de la famille. Cependant, l’iconostase des gens pauvres est plus simple,alors que les gens riches se permettent une décoration plus abondante, en bois de haute qualité comme le noyer.

La tradition d’avoir une iconostase chez soi existe encore de nos jours: elle est toujours considérée comme protègeant les habitants des forces nuisibles et des démons.

Cette iconostase vient de la région de Triavna et a été réalisée par le maître sculpteur Neikov Tzanko en 1870.

 

Coffre de dot

Ce coffre de dot rectangulaire est fait de planches en bois de chêne chevillées les unes aux autres, sans qu’un seul clou ne soit utilisé. Posé sur ses quatre pieds, il donne une impression de stabilité. La face avant du coffre de dot est sculptée d’une rosace à six feuilles et ses deux côtés sont richement décorés et peints de récipients pareils à des cruches d’où émergent deux pommiers. Sur un des côtés du coffre, sont notés l’année de mariage et les initiales de la mariée. C’est ce qui en fait un objet unique et personnel. Le coffre a des poignées en métal des deux côtés et une serrure avec une clé au centre. Les coffres de dot peuvent soient être, comme celui-ci, sculptés de motifs végétaux, géométriques ou de serpent, ou bien être peints. Les ornements peuvent figurer des motifs de rideaux, de récipients ou de fleurs. Ils ont des tons rouges (symbole de la vie renaissante), jaunes (symbole de l’or et de l’éternité), verts (symbole du lien avec la nature) et noirs (symbole de la terre-mère). Toutes ces couleurs mises ensemble expriment des souhaits de bonheur et de prospérité pour le jeune couple.

Ce coffre de dot permet à la mariée d’y ranger son trousseau avant son mariage: elle y met ses vêtements, ses bijoux, ses boucles de ceinture, et les étoffes qu’elle a brodé en vue de son mariage. Il lui appartient et elle peut l’emporter si jamais elle quitte sa belle-famille. Plus tard, ses enfants hériteront de ce coffre et de son contenu. Ce coffre montre la richesse de la famille.

Objets rituels et festifs:

Oeufs de Pâques

A l’occasion de la fête de Pâques, des oeufs sont bouillis et leur coquille est peinte. Souvent, un fond rouge ou blanc leur est appliqué et des décorations aux contours noirs sont remplis de multiples couleurs: rouge, vert, jaune, etc. La couleur la plus importante, devant apparaître sur les oeufs, est le rouge. Il symbolise le soleil et représente sa forme vivifiante. La plupart des motifs représentés sur les oeufs sont des figures végétales ou des formes géométriques telles des rosettes, des triangles ou des rectangles. Chaque motif a une importance symbolique : la décoration végétale marque le lien avec la nature renaissante, les rosettes symbolisent le soleil, et d’autres symbolisent la joie, l’ amour ou encore la santé. L’œuf lui-même a une forme sphérique qui symbolise la vie et la renaissance de la nature.

Ces oeufs sont offerts aux proches durant les 40 jours suivant les fêtes de Pâques, jusqu’à l’Ascension. Ils participent aux pratiques rituelles pour préserver la santé et la fertilité. Le jeudi précédant Pâques, le premier oeuf est peint en rouge et posé dans l’iconostase familiale, près de l’icône. Cet œuf est gardé jusqu’aux Pâques de l’année suivante. Si un an après, l’œuf est plein, l’année sera fertile. C’est une pratique païenne que le christianisme a récupéré. La tradition des œufs de Pâques est encore vivante aujourd’hui dans tout le pays.

Pain des premiers pas

Ce moulage en argile coloré représente un « pain des premiers pas », un pain préparé à l’occasion d’une fête célébrant les premiers pas de l’enfant. Ce pain est fait avec de la farine de blé, du levain (levure), du sel, du sucre et de l’eau et on lui donne la forme d’un pied de bébé.

Il est consommé à l’occasion d’une fête rituelle appelée ‘prostapulnik’ fêtant les premiers pas d’un enfant. Lors de cette fête, des objets-symboles de différentes professions sont présentés à l’enfant: celui qu’il choisira en premier est sensé montrer sa future orientation professionnelle. Le pain est roulé sur un tissu et l’enfant le suit. La mère coupe alors des morceaux de pain et court les donner aux invités le plus vite possible pour que l’enfant soit vif et agile. Cette fête souligne le moment où l’enfant, courant après le pain, s’éloigne de sa mère et de son lait pour ‘aller après son pain’.

Pain de funérailles

Ce moulage en argile coloré représente un pain utilisé pour des funérailles ou pour un repas funèbre. Son usage est reconnaissable aux décorations qu’il arbore: un sceau représentant une croix autour duquel est inscrite l’abréviation de l’expression ‘Jésus Christ vainc’. Sa forme ronde, la plus répandue, est liée au culte du soleil.

Lors d’un décés, les proches du défunt font des pains de funérailles pendant 40 jours. Ces pains sont distribués et répartis entre les parents et les voisins du défunt pour le salut de l’âme du mort. Ils sont aussi consommés lors du repas funéraire.

Le pain, nourriture de base des Bulgares, participe à tous les rites de leur vie. Il est un objet de culte.

Rameau, sourvatshka

Cet objet est fabriqué en bois de cornouiller: autour d’une branche centrale, d’autres branches sont pliées et attachées de manière à former des cercles. Des pops corns, des petites brioches, des piments, des fruits secs, de l’ail et des noix sont enfilées et ficelées au bâton. Dans les régions montagnardes, on y ajoute de la laine blanche ou colorée.

Cet objet a un rôle rituel et véhicule de nombreux symbole: ainsi, le cornouiller est choisi parce qu’il fleurit plus tôt et meurt plus tard que les autres arbres. Les cercles qu’il forme symbolisent le soleil et la terre, forces créatrices à qui est dûe la fertilité et son aspect général rappelle celui de ‘l’arbre de vie’. Parmi les élèments décoratifs, les pops corns et les brioches symbolisent la terre-mère, les piments rouges sont signe de fécondité masculine, la laine a un rôle protecteur magique contre les maladies ou les forces malfaisantes.

Ce rameau est utilisé le jour du nouvel an: le 1er janvier, les enfants frappaient le dos de tous les habitants du village avec les rameaux en les bénissant: ‘Que l’année soit saine et joyeuse, Que le blé soit grand au champ, Que la pomme rouge soit au jardin, Qu’on soit sain et sauf jusqu’à l’année suivante.’ Les gens croient que ce geste assure l’abondance de la nature, du bétail et des fruits de l’activité humaine. Ils attribuent une force magique au rameau. Après ce jour on le jette. Ce rituel, tout comme le premier jour du nouvel an, s’appelle Sourva.

Ces rameaux sont fabriqués par les enfants et sont une des créations les plus pittoresques de l’art populaire.